Give Peace a Chance

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Give Peace a Chance
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John Lennon en juin 1969 à Montréal, lors de l'enregistrement de Give Peace a Chance.
Single de John Lennon
Face A Give Peace a Chance
Face B Remember Love
Sortie
Enregistré
hôtel Reine Élizabeth, Montréal
Durée 4:54
Genre Pop
Format 45 tours
Auteur-compositeur John Lennon
(créditée à l'origine Lennon/McCartney)
Producteur André Perry
Label Apple Records (APPLE 13)

Singles de John Lennon

Give Peace a Chance est la première chanson officielle produite de la carrière solo de John Lennon et sortie en . Elle est écrite par Lennon mais créditée originellement à Lennon/McCartney.

Elle est enregistrée le dans une suite de l'hôtel Reine Élizabeth de Montréal, dans le cadre du second Bed-in du fondateur des Beatles et de sa nouvelle épouse Yoko Ono, militant pour la paix dans le monde, entourés de nombreux participants, célèbres ou anonymes.

Dans cette chanson, Lennon invite simplement à donner une chance à la paix, dans le contexte, entre autres, de la guerre du Viêt Nam. Il s'agit donc d'un hymne à la paix.

Historique[modifier | modifier le code]

À la suite de leur mariage, le à Gibraltar, les époux décident de profiter de leur notoriété en faisant de leur lune de miel un « happening ». Ils s'installent, du 25 au , au Hilton de Amsterdam pour y effectuer un Bed-In pour la paix. Un film de 40 minutes intitulé Honeymoon, réalisé par Peter Goessens, en est tiré en plus de leur troisième album d'avant-garde, Wedding Album[1]. Voulant propager encore plus leur message de paix, ils décident donc de refaire le coup aux États-Unis mais l'arrestation de Lennon pour possession de cannabis, le de l'année précédente, l'empêche d'y mettre les pieds. Ils décident donc de se diriger vers les Bahamas mais réalisent qu'ils y passeraient plutôt inaperçus. Ils se ravisent et décident de partir vers le Canada[2], mais prennent le temps de répéter la chanson Give Peace a Chance dans leur chambre d'hôtel du Sheraton Oceanus Hotel[3]. Le , dès leur arrivée à Montréal, Lennon et Ono se rendent à l'hôtel Reine Élizabeth au centre-ville où ils occupent les suites 1738, 1740 et 1742[4]. C'est dans la suite 1742 que le lit nuptial est installé[5]. Ils y passeront une semaine, interviewés par de nombreux journalistes surtout américains[n 1]. Le , ils enregistrent la chanson Give Peace a Chance et, durant la nuit, la face B signée Yoko Ono, une ballade intitulée Remember Love, accompagnée de son époux à la guitare[6].

Give Peace a Chance est écrite par John Lennon mais, au moment de sa sortie, créditée Lennon/McCartney (la signature commune que Paul McCartney et lui utilisaient pour toutes leurs chansons au sein des Beatles). Cette chanson n'ayant pourtant rien à voir avec le groupe – qui commence alors à se séparer –, John Lennon s'explique en 1980 sur ce choix des crédits : « Je ne sais même pas pourquoi son nom était dessus. Il est là parce que je me sentais en quelque sorte coupable, parce que j'avais sorti un single solo – le premier – et que j'étais vraiment en train de rompre avec le groupe. ». Plus tard, lors des sorties d'albums posthumes, les crédits ont été attribués au seul Lennon.

La campagne pour la paix de John et Yoko prendra fin au Canada le 23 décembre de la même année, lorsqu'ils rencontreront à Ottawa, dans l'édifice du centre de la colline du Parlement, le premier ministre. Ils passeront cinquante minutes avec Pierre Elliot Trudeau pour ensuite s’entretenir, environ deux heures, avec le ministre de la santé John Munro[7].

Structure musicale[modifier | modifier le code]

Les couplets ne possèdent pas de vers véritables mais sont simplement des suites de mots ou de noms avec quelques touches d'humour. Le refrain, répété en chœur tel un mantra[8], est « All we are saying is give peace a chance » (« Tout ce que nous disons c'est donner une chance à la paix »). John Lennon est accompagné de Tommy Smothers (en) à la guitare sèche et Yoko Ono et les visiteurs dans la chambre deviennent choristes et s'accompagnent avec des clappements de mains. Ce happening fait partie de la campagne pacifique qui marque sa dissidence politique et l'activisme anti-guerre opéré avec ses proches (les deux bed-in où des artistes et des représentants des médias sont invités, grandes affiches dans la rue, et inserts dans les journaux, avec le slogan War is Over! If You Want It - une vaste opération, à ses frais[9].

Enregistrement[modifier | modifier le code]

Enregistrement à Montréal de Give Peace a Chance. On aperçoit John et Yoko, Timothy Leary, de profil, Tommy Smothers, de dos avec sa guitare, Judy Marcioni et Paul Williams.

La chanson Give Peace a Chance est enregistrée par le producteur montréalais André Perry le , lors du fameux Bed-in tenu dans cette suite en utilisant simplement huit microphones, un magnétophone Scully à quatre pistes loués chez RCA Victor dans cette ville et une console d'enregistrement huit pistes de marque Ampex[10].

Les paroles de la chanson sont affichées en grand sur les murs de la chambre. Lennon chante et joue de la guitare, accompagné par Tommy Smothers, du duo Smothers Brothers, au milieu d'une assistance d'une quarantaine de personnes parmi lesquelles le militant Timothy Leary et sa conjointe Rosemary Woodruff Leary, l'attaché de presse Derek Taylor, le poète Allen Ginsberg, des membres de Hare Krishna, (tous mentionnés dans les paroles[n 2]), le futur ambassadeur du Canada aux Nations Unies Allan Rock, le comique Dick Gregory, la chanteuse britannique Petula Clark, le disc jockey Murray the K (en), quelques journalistes, des amis du couple, et même, selon Derek Taylor, un membre de la CIA infiltré.

Muni d'une fausse carte de presse, Allen Radu, jeune admirateur montréalais alors âgé de 17 ans, arrive à se faufiler dans la chambre 1742 avec son appareil photo. Lennon se rend compte du subterfuge et invite le jeune téméraire à demeurer parmi eux durant quatre jours. Il réalise plus de 160 clichés inédits, qu'il exposera vingt-cinq ans plus tard au 1000 De La Gauchetière[11] à Montréal.

Gail Renard, également montréalaise d’origine, a participé à l'âge de 16 ans à ce Bed-in. John Lennon lui a laissé, comme souvenir de l’événement, le manuscrit des paroles de la chanson Give Peace a Chance. Gail Renard, qui réside désormais au Royaume-Uni, a réalisé par la suite, compte tenu du retentissant succès de l’œuvre, qu’elle était détentrice d’un document d’archives exceptionnel. Ce manuscrit, qui a été mis en vente aux enchères le [12] chez Christie’s à Londres, lui a rapporté quelque 840 000 $ canadiens[13].

André Perry, qui mit sur pied par la suite le réputé Le Studio, relève le défi de l'enregistrement et de la post-production de Give Peace a Chance malgré la mauvaise acoustique de la chambre d'hôtel. Le mixage est fait le lendemain à son studio à Brossard, dans la banlieue sud de Montréal. Perry supprime notamment la majorité des voix des participants et les remplace en studio en utilisant une dizaine de chanteurs, professionnels, comme Robert Charlebois et Mouffe, et non professionnels. La voix de John Lennon ainsi que le son de sa guitare et celle de Tom Smothers sont gardées intactes[14],[6]. Ensuite, André Perry effectue le rythme sur une poubelle en caoutchouc[15],[16] en ayant recours à une tape loop[10]. Pour le remercier, John Lennon fait inclure son adresse complète sur l’étiquette du disque[n 3], ce qui attira l’attention sur le jeune preneur de son et réalisateur québécois[17].

Parution et réception[modifier | modifier le code]

Conçue hors albums, la chanson est publiée en 45 tours le en Angleterre et le en Amérique du Nord par la maison de disque Apple. Une version dans le format insolite PocketDisc (en) a aussi été mise en marché[18]. Give Peace a Chance va devenir rapidement l'hymne pacifiste d'une génération. La chanson deviendra numéro 2 en Angleterre et numéro 14 au Billboard Hot 100 aux États-Unis et atteindra la première place aux Pays-Bas. Un des grands succès de Lennon, on retrouvera un court extrait de la chanson en ouverture de la compilation Shaved Fish parue en 1975 et la finale d'une version live, enregistrée le 30 août 1972 lors du concert bénéfice « One to One », est greffée à la chanson Happy Xmas (War Is Over) qui clôt cet album. Soixante secondes de cette version live est aussi incluse sur l'album Live in New York City tiré de ce concert et publié en 1986.

On entend pour la première fois la chanson originelle au complet sur un album lorsqu'elle est incluse sur The John Lennon Collection en 1982. Elle sera présente sur toutes les compilations des meilleurs succès du musicien publiées au fil des années. La face B, Remember Love, est incluse comme piste bonus sur la réédition de Unfinished Music No.1: Two Virgins conjointement parue en 1997 sur étiquettes Rykodisc, Apple Records et Lenono (RCD 10411)[19]

Reprises[modifier | modifier le code]

Cette chanson est reprise dès 1970 par Louis Armstrong sur son album de reprises Louis Armstrong and his Friends.

Devenue hymne des mouvements pour la Paix comme de ceux de protestation contre l'usage nucléaire, Give Peace A Chance est entonné lors des manifestations contre la guerre du Viêt Nam à la fin des années 1960. Adapté par Pete Seeger lors d'un énorme rassemblement pour la paix, le au Moratorium du Capitol, la chanson sera reprise en chœur par un demi-million de participants[20]. John Lennon affirmera que ce fut « l'un des plus grands moments de sa vie »[21].

Cette chanson a été reprise par le Peace Choir en 1991 pour protester contre la Guerre du Golfe. Formé à l'initiative de Lenny Kravitz avec Yoko Ono et Sean Lennon, qui ajoute d'ailleurs de nouvelles paroles au texte original pour l'occasion, ce groupe comprenait, entre autres, Little Richard, Peter Gabriel, Randy Newman, Iggy Pop, Tom Petty, Cyndi Lauper, Flea et John Frusciante, Al Jarreau, LL Cool J, etc. Paul McCartney lui-même l'a chanté en concert lors de sa tournée 2009, l'enchaînant après son interprétation de A Day in the Life.

Madonna interprète Give Peace a Chance lors de son concert à Moscou du , donné dans le cadre de son Confessions Tour[22]. Il existe également une version reggae de cette chanson jouée par The Maytals sur la compilation Reggae Tribute to the Beatles et également Max Roméo en concert sur sa tournée 2010.

Le vendredi 4 mars 2022 à 8h45, cent-cinquante radios européennes ont diffusé cette chanson pour la paix et contre la guerre en Ukraine[23].

Classements[modifier | modifier le code]

Classement (1969) Meilleure
place
Drapeau de l'Allemagne Allemagne (Media Control AG)[24] 4
Drapeau de l'Autriche Autriche (Ö3 Austria Top 40)[25] 2
Drapeau de la Belgique Belgique (Flandre Ultratop 50 Singles)[26] 3
Drapeau des États-Unis États-Unis (Billboard Hot 100)[27] 14
Drapeau des États-Unis États-Unis (Cashbox Top 100)[28] 11
Drapeau de la France France (IFOP)[29] 99
Drapeau de la Norvège Norvège (VG-lista)[30] 11
Drapeau des Pays-Bas Pays-Bas (Single Top 100)[31] 1
Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni (UK Singles Chart)[32] 2
Drapeau de la Suisse Suisse (Schweizer Hitparade)[33] 4

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Une interview téléphonique avec les animateurs Tom Campbell (en) et Bill Holley de la station KYA 1260 (en) de San Francisco est distribuée en 45 tours et est aujourd'hui une pièce de collection rarissime ([1]). Source : Discogs [2]
  2. Les personnalités mentionnées sont : John and Yoko, Timmy Leary et sa femme Rosemary, Tommy Smothers, Bobby Dylan, Tommy Cooper (en), Derek Taylor, Norman Mailer, Allen Ginsberg.
  3. « Recorded in Room 1742 Hotel La Reine Elizabeth, Montreal by Les Studios André Perry, 7585 Malo, Ville de Brossard, PQ Canada ». Source : https://www.discogs.com/The-Plastic-Ono-Band-Give-Peace-A-Chance-Remember-Love/release/390189

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Joe Goodden, « John and Yoko’s first bed-in for peace: Amsterdam », sur The Beatles Bible (consulté le )
  2. (en) Joe Goodden, « John and Yoko’s second bed-in for peace: Montreal », sur The Beatles Bible (consulté le )
  3. (en) Claire Shaffer, « John Lennon Estate Releases Early Demo Video of ‘Give Peace a Chance’ », Rolling Stone,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  4. Reportage de Radio-Canada pour célébrer le 35e anniversaire du bed-in
  5. Reportage de Radio-Canada, des témoins racontent le bed-in
  6. a et b Éric Clément, « Les 50 ans du bed-in de John Lennon et Yoko Ono », La Presse,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. (en) Joe Goodden, « John Lennon and Yoko Ono meet Canadian prime minister Pierre Trudeau », sur The Beatles Bible (consulté le )
  8. (en) Carol estes, « Who's Afraid of Music » Yes! magazine, 30 juin 2002.
  9. (en) Louis Kaplan, « “War is Over! If You Want It”. John and Yoko’s Media », Journal media culture, février 2003
  10. a et b [Précisions apportées par André Perry, prise de son], consulté le 04/04/2009
  11. Photographier John et Yoko
  12. « Le manuscrit de Give Peace a Chance, ça s’appelle aussi un document d’archives », (consulté le )
  13. Sébastien Bardos, « Quand «Give Peace a Chance» fut donné à Gail… », Libération, (consulté le )
  14. Éric Clément, « Dans Give Peace a Chance, Charlebois entend sa voix », La Presse,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  15. Site famillerock.com, article d'Élizabeth Ménard "La vraie histoire de Give Peace a Chance".
  16. Entrevue d'André Perry par Benoit Dutrisac 1:55 Source : https://www.tvanouvelles.ca/2019/05/28/un-quebecois-dit-avoir-sauve-la-chanson-give-peace-a-chance
  17. Élizabeth Ménard, « La vraie histoire de Give Peace a Chance », Le Journal de Montréal, 23 mai 2014.
  18. (en) Frank Daniels, « Reference Library: Beatles on Lost Formats », sur The Internet Beatles Album (consulté le )
  19. (en) « Yoko Ono/John Lennon – Unfinished Music No. 1. Two Virgins. », sur Discogs (consulté le )
  20. Give Peace A Chance – Peace Movements Through Songs 26 février 2014 sur atomsforeu.hypotheses.org
  21. (en)Louis Kaplan, « “War is Over! If You Want It” », M/C Journal, février 2003.
  22. (en) Irina Kulik, « Madonna Saddles and Rocks Moscow »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur Kommersant, (consulté le )
  23. « Cette chanson a été diffusée à la même heure partout en Europe pour une raison symbolique », sur Le HuffPost, (consulté le )
  24. (de) Musicline.de – Plastic Ono Band. GfK Entertainment. PhonoNet GmbH. Consulté le 25 juin 2016.
  25. (de) Austrian-charts.com – Plastic Ono Band – Give Peace A Chance. Ö3 Austria Top 40. Hung Medien. Consulté le 25 juin 2016.
  26. (nl) Ultratop.be – Plastic Ono Band – Give Peace A Chance. Ultratop 50. Ultratop et Hung Medien / hitparade.ch. Consulté le 25 juin 2016.
  27. (en) John Lennon, « John Lennon - Awards », AllMusic (consulté le )
  28. (en) John Blaney, John Lennon : Listen to This Book, S.l., Paper Jukebox, , illustrated éd., 350 p. (ISBN 978-0-9544528-1-0, lire en ligne), p. 326
  29. « Les chansons classées par artiste(lettre "P") », sur Infodisc.fr, Dominic DURAND / InfoDisc (consulté le ) (cliquer sur l'onglet et sélectionner "PLASTIC ONO Band")
  30. (en) Norwegiancharts.com – Plastic Ono Band – Give Peace A Chance. VG-lista. Hung Medien. Consulté le 25 juin 2016.
  31. (nl) Dutchcharts.nl – Plastic Ono Band – Give Peace A Chance. Single Top 100. Hung Medien. Consulté le 25 juin 2016.
  32. (en) Archive Chart. UK Singles Chart. The Official Charts Company. Consulté le 25 juin 2016.
  33. (en) Swisscharts.com – Plastic Ono Band – Give Peace A Chance. Schweizer Hitparade. Hung Medien. Consulté le 25 juin 2016.

Liens externes[modifier | modifier le code]